Répandue dans Paris par les magasins du Bon Marché juste avant les fêtes, cette affiche publicitaire m'a beaucoup plu.
Parce qu'un produit destiné à la vente ne vise pas le besoin mais le désir, il est chargé d'un sens dont le capital signifiant de l'entreprise est la fabrique. Pour le style, on dira qu'il a une âme.
Qu'il s'agisse du business model d'une entreprise ou du don, il y a toujours de l'âme. Quelques mots de Marcel Mauss : "La chose elle-même a une âme, est de l'âme, car accepter quelque chose de quelqu'un c'est accepter quelque chose de son âme". Telle est la voie royale vers l'inconscient de l'entreprise.
Le produit est signifiant parce qu'il a vocation à être un cadeau. L'institution de l'argent est un artifice social qui facilite sa circulation. Mais elle n'annule pas l'intentionnalité de l'acte. Cadeau du producteur au consommateur qui, à l'occasion des fêtes, l'endosse au profit de son destinataire. Une forme moderne du commerce des âmes, au sens déjà employé ailleurs pour le commerce des idées.
Cette affiche est à elle seule un cours d'économie politique, confirmant dans un style ramassé, l'idée de Marcel Mauss selon laquelle dans la transaction commerciale, le don est toujours sous-jacent. Pourquoi ? Simplement parce que, en contrepartie de la monnaie, ce qui circule c'est précisément de l'âme, bref du signifiant.
Au lendemain des fêtes, voici la nouvelle affiche publicitaire proposée par Le Bon Marché ! Doit-on en conclure que les âmes, délestées de leurs prix, s'en retournent au ciel, vous invitant à les suivre ?
Si l'enchaînement a été voulu, que l'intelligence des créatifs soit louée. Dans le cas contraire, l'inconscient nous prouve une fois de plus ses talents en matière de rhétorique.
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