C'est le titre d'un petit texte écrit par Freud en 1919. Mais c'est aussi, malheureusement, un fantasme encore répandu parmi les français en matière d'éducation, presque cent ans après, comme en témoignent les commentaires des internautes suscités par les articles qui paraissent sur le sujet. Quelques exemples.
Le 6 décembre 2007, le site Liberation.com titrait Qui n'a pas eu sa fessée ? avec un article mentionnant une étude menée sur la violence physique faite aux enfants en Europe. On y apprend, entre autres, que la moitié des pays de l'Europe ont voté une loi l'interdisant ... mais pas la France. Et pour cause !
Le 23 janvier 2009, avec 2009 pourrait être l'année de l'abolition de la fessée le Figaro.com relance le débat qui vire au tollé général, si l'on en juge d'après les commentaires. Les plus pressés n'auront qu'à savoir qu'un sondage accompagnant l'article (Faut-il interdire la fessée ? ) recueille, auprès de plus de 20 000 votants, 9,5% de pour et 90,5% de contre.
A l'heure de la mondialisation à outrance, il est utile de comprendre ce qui hante l'inconscient de chaque pays. Des travaux importants existent au sujet du nôtre. Je pense en particulier à ceux de Michel Crozier. Sa thèse sur la bureaucratie à la française, exposée dans son livre "Le Phénomène bureaucratique" (1964), fait ressortir les deux maux principaux qui y affectent les modalités de l'action collective : la peur du face à face et des relations d'autorité, d'une part, et la communauté délinquante, d'autre part. Or, l'impossible dialogue entre les différents niveaux hiérarchiques est une constante bien connue dans beaucoup (pas toutes heureusement) d'entreprises françaises, tout comme le fait que le projet hostile est un élément fédérateur pour le travail en commun.
Les recherches de Michel Crozier ont reçu de solides confirmations à travers deux études internationales récentes amplement utilisées et analysées par Thomas Philippon dont j'ai précédemment commenté le travail. Comparant la qualité des relations professionnelles entre plus d'une centaine de pays, ces études classent la France dans les derniers.
Un travail important reste à faire, comme m'en convainc chaque jour la pratique de l'inconscient des entreprises en France : faire ressortir clairement le lien existant entre la difficulté qu'elles éprouvent dans l'organisation de l'action collective et un mode d'éducation des enfants dont la violence physique est un des symptômes. En effet, le travail en commun exige avant tout un rapport exempt de passion et d'émotion à l'égard de l'autorité. Pour bien des français, les faits n'ont pas assez d'autorité, il leur manque celle de la fessée pour y mettre un peu, souvent beaucoup, d'émotion.
Le spectacle du quotidien en dit plus parfois que de longs discours. Qui n'a vu dans les rues de nos villes, au moins une fois dans sa vie, un enfant en pleurs après être tombé, recevoir quelques coups de surcroît ?
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