Le Web 2.0 est une annonce. On ne définit pas une annonce, on cherche plutôt à y déceler une intention. Voici une phrase qui, me semble-t-il, dévoile l’un des puissants ressorts inconscients de l’enthousiasme pour un nouveau monde transfiguré par le Web 2.0 :
« La mobilité sans effort constitue une espèce de bonheur irréel, de suspens de l’existence et d’irresponsabilité. Cette euphorie dynamique joue comme parenthèse à la réalité sociale. Un compromis extraordinaire est réalisé : celui d’être chez soi et d’être de plus en plus loin de chez soi. »
L’abolition du temps et de l’espace est un formidable simplificateur de la réalité sociale. Débarrassé de la résistance de son hic et nunc, trop souvent pesant dans l’entreprise, le social cesse d’être une réalité pour devenir un lien à l’état pur, à la fois démultiplié et allégé.
Un champ nouveau s’ouvre à la collaboration universelle (wiki), au don d’ubiquité (les flux permettant de ne perdre aucune information), à la liberté de l’expression (blogs), et à la possibilité infinie des rencontres (réseaux sociaux)
Ce qui m’a paru intéressant dans cette phrase, c’est qu’elle date de 1968. Bien avant le Web 2.0, Jean Baudrillard y parlait de l’automobile. Comme quoi si les modes sont changeantes, les passions humaines ont de la constance, en particulier lorsqu’elles s’emparent des avancées de la technique.
De l’automobile au Web on voit à l’oeuvre la même intention émancipatrice. Le hic et nunc de la réalité sociale est une résistance à abattre. Le Web 2.0 veut prospérer sur ce terrain.
Et que dis-tu du Web 3.0, (voir John Markoff, "Entrepreneurs See a Web Guided by Common Sense", The New York Times 12 novembre 2006), également dénommé "the semantic Web" ?
Je cite : "Web 2.0, which describes the ability to seamlessly connect applications (like geographic mapping) and services (like photo-sharing) over the Internet, has in recent months become the focus of dot-com-style hype in Silicon Valley. But commercial interest in Web 3.0 — or the “semantic Web,” for the idea of adding meaning — is only now emerging."
Rédigé par : Michel Volle | 12 novembre 2006 à 17:33
Merci de mentionner cet article que je n'avais pas remarqué. Une réaction à chaud : ce web 3.0 va peut-être combler ce que j'aperçois déjà comme une lacune potentielle du 2.0. L'euphorie flux / colaboration / réseaux sociaux va certainement provoquer des effets de saturation qui vont limiter les applications 2.0.
Ceci dit, ce qui touche au langage est plus complexe qu'il n'y paraît.
Rédigé par : DT | 12 novembre 2006 à 18:18