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16 février 2008

Commentaires

Pfeireh

Je voudrais traduire la citation de Vincent Descombes que vous commentez par :
"L'existence est grammaire et la grammaire est existence", la seconde partie de l'équivalence venant de ce que la citation nie à l'homme tout aspect qui ne soit purement matériel.

C'est un enjeu : si l'existence est grammaire (ou institution) et que celle-ci est l'existence, alors la psychanalyse de l'entreprise devient une simple histoire de l'entreprise.

En effet c'est bien à la grammaire (à l'institution), que s'intéresse votre psychanalyse de l'entreprise telle que je la comprends, en refusant d'y accorder une place active à l'homme comme le souligne votre dernière réponse sous votre billet consacré à Mary Douglas("l'instrumentalisation se déploie de l'institution vers les personnes").

Or il me semble que, bien que sa méthode soit existentielle, l'enjeu de la psychanalyse est essentiel.
Ainsi, paradoxalement, vouloir faire de l'institution une entité distincte de l'individu et les placer tout deux dans une relation instrumentalisante à sens unique nous interdit de pouvoir atteindre le but de la psychanalyse au sein de l'entreprise, bien qu'on en pourra y appliquer la méthode à souhait.

Je lis dans le très beau travail que vous avez écrit sur Renault une histoire emplie de sens. Je ne vois pas la prise de conscience qui vient couronner la psychanalyse : par quel moyen concret l'entreprise peut-elle tirer le fruit de la psychanalyse ? comment remontent les processus inconscients dans le domaine du conscient ?

J'achoppe. Ne doit-on pas se rappeler de l'intuition de Michel Crozier qui avait reconnu qu'une partie de chaque individu n'était pas malléable au gré de l'institution ? n'est-ce pas justement sur ce point que Freud lui même n'a pas pu faire le pas d'une psychanalyse des foules ?
Tout ceci fait écho à ce passage de mon dernier commentaire : "[Les institutions] sont grammaire, et pourrait-on dire, rien de plus".

N'y voyez pas une remise en question de votre travail dont je suis fervent amateur. Je suis persuadé que grâce à vous nous allons dans la bonne direction.
La traduction que je fais de la citation de Vincent Descombes est peut-être rapide, cependant la question que j'en tire a accompagné sans cesse ma lecture de vos textes et j'espère que vous voudrez bien y répondre.

PS : puisque nous parlons de demande, l'offre que vous proposez en rencontre t-elle ? la tâche à accomplir paraît immense : peut-elle être le fait d'un seul homme ?

DT

1. "En effet c'est bien à la grammaire (à l'institution), que s'intéresse votre psychanalyse de l'entreprise telle que je la comprends"
Oui, en grande partie, et c'est la raison pour laquelle j'évite de parler de psychanalyse. L'inconscient du dirigeant a peu d'intérêt. Ses décisions en ont, et surtout leur effet dans le cadre institutionnel.

2. "en refusant d'y accorder une place active à l'homme"
Au contraire, l'homme y fait tout. Seuls les individus sont moteurs, mais le sens de leur action est souvent canalisé par l'institution.

3. "vouloir faire de l'institution une entité distincte de l'individu et les placer tout deux dans une relation instrumentalisante à sens unique"
Les deux sont inséparables. L'institution joue un rôle dans le psychisme de chacun. On l'entend très bien dans les discours individuels, souvent structurés par l'institution.

4. "Je ne vois pas la prise de conscience"
Elle intervient lorsque le lien entre des processus concrets de l'entreprise, apparemment hétérogènes, est refait, que ce soit individuellement ou collectivement.

5. La part irréductible que M.Crozier attribue à l'individu n'est pas à négliger ; mais justement, la pratique consiste à appréhender la dialectique entre Ics de l'institution et celui de ses acteurs. Il me semble que M.Crozier, en voyant dans l'institution un "compromis historique" entre les acteurs, lui refuse le statut de sujet, ce qui nous différencie.

6. L'offre est le plus souvent l'initiative d'un individu. Elle devient produit marchand lorsqu'elle s'institue dans une entreprise. Donc oui, une personne peut suffire pour la concevoir et la concrétiser, mais sans légitimité institutionnelle, elle a du mal à exister.

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