S’inspirant d’une observation faite dans le salon d’un aéroport européen, Jonathan Schwartz, le CEO de SUN, donne dans un post récent publié sur son blog, sa vision de l’avenir du téléphone mobile. Regardant autour de lui, il s’est aperçu que la majorité des passagers en attente, étaient occupés à surfer sur l’écran de leur terminal portable, beaucoup plus qu’à téléphoner. Sa conclusion : l’avenir du net est sur le téléphone portable, pas sur le PC.
La lecture de ce commentaire m’a fait réagir à mon tour car j’y trouve une nouvelle confirmation de ce que j’ai pu observer chez mes clients du secteur des communications mobiles.
Dans l’enthousiasme général induit par le progrès de la technologie, on a tendance à ne percevoir qu’une augmentation vertigineuse des communications entre les personnes. Si la tendance est un fait, son sens n’est peut-être pas unique. Pourquoi ?
Tout le monde s’accorde à dire que le développement du net, et notamment de l’e-mail, a multiplié la circulation de l’information tout en réduisant l’échange verbal direct, surtout par téléphone. L’écriture digitale semble, depuis maintenant plusieurs années, prendre le pas sur la parole digitale. Dira-t-on que le téléphone portable contrebalance le phénomène ? A voir.
Certes, on téléphone beaucoup avec son portable. Mais justement, l’accès immédiat et facile à l’autre se fait au détriment de la nécessité de le rencontrer plus souvent. Si le net a substitué l’écrit à la parole, le portable a substitué la parole à distance à la rencontre physique.
Dans la même veine que le développement de l’e-mail, on peut supposer que le téléphone portable va devenir le lieu privilégié de l’écrit en temps différé au détriment de la parole en temps réel.
Pour avoir travaillé avec plusieurs clients dans le domaine des communications mobiles, j’ai été frappé par l’importance accordée dans le développement des produits, aux fonctions autres que le transport de la voix en temps réel : stockage de l’information, mémorisation, messagerie … Le téléphone portable devient de plus en plus un filtre et un instrument d’émancipation par rapport au temps réel en permettant de maîtriser les contraintes liées à la communication.
Il s’inscrit donc dans cette tendance lourde qui veut que le formidable développement des communications s’accompagne d’une conduite d’évitement de la relation directe avec l’autre en temps réel.
Voilà comment un produit peut incorporer des intentions que seul un travail d’interprétation permet de mettre en évidence tant elles vont à l’encontre du sens commun.
Qu’est-ce qu’un business model ? Ce n’est pas une idée comme je l’ai indiqué ailleurs, mais la réponse à une triple question : qu’est-ce que l’on veut donner (classiquement appelé le produit), à qui (il s’agit in fine du client) et comment s’y prend-on (c’est l’organisation et le management).
Trop souvent, le produit est perçu d’une façon tronquée, masquant parfois volontairement l’intention qu’il incarne. S’il est une offre animée d’une intention, il détient la clé de la signification du business model de l’entreprise et donc des leviers de l’innovation et du management.
Disons que les modes de communication sont en train de changer. Croyez-vous vraiment qu'on peut éviter le contact lorsqu'on est joignable à tout moment et partout ?
Je me demande si au contraire les personnes ne sont pas prises comme dans une toile d'araignée. Ce que vous appelez évitement est peut-être une défense naturelle.
Rédigé par : Eric | 25 septembre 2006 à 17:02